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Les trois croix mémorielles de Larouillies
Il n’est pas rare, hélas, de trouver au bord de nos routes un endroit fleuri qui atteste qu’une jeune vie a payé là le tribut de sa vie à la vitesse et au dieu automobile.
Cette coutume est très ancienne : en des temps plus christianisés, des familles ou la communauté érigeaient des croix mémorielles en souvenir d'un événement tragique particulier.
Larouillies en possède trois très anciennes que nous présentons ici.
1. La Croix Petit : un meurtre au XVIIIe siècle - 1732
Récit
«Le 27 septembre 1732, le seigneur de Montplaisir, d'autres disent celui du Floyon, chevauchait sur le chemin bourbeux allant de Montreuil à Etrœungt.
Un pauvre ouvrier, Joseph Petit, travaillait dans son pré longeant ce chemin ; à peu de distance, était couché un petit chien bien inoffensif, d'une des plus petites espèces de la race canine. Le galop du cheval fit relever le chien, qui vint aboyer derrière la monture. Le seigneur, furieux, retire des fontes de sa selle un pistolet et met en joue la vigilante bête. Joseph Petit accourt et supplie le colérique hobereau d'épargner la vie de son fidèle compagnon. « Eh bien ! alors, c'est toi que je vais abattre, pour t'apprendre à tenir ton chien », lui répond le seigneur. Et joignant l'action à la parole, il vise le malheureux, qui tombe et expire sans secours, après quelques minutes d'horribles souffrances. Le criminel, sans se préoccuper de l'état de sa victime, continua sa route, le cœur léger. Ce qui est plus fort, c'est qu'il ne fut jamais inquiété.»
Gaston Bercet, Histoire de Larouillies, 1900.
Les registres de l'état‑civil mentionnent ainsi le décès : « 27 septembre 1732, Joseph Petit, âgé de 27 ans, a été tué.»
« À l'endroit où le seigneur de Montplaisir commit cet assassinat on a élevé, au pied d'une haie d'épines, une croix en pierre calcaire bleui, d'une hauteur de un mètre cinquante centimètres, sur laquelle on lit l'inscription suivante :
Icy malheureusement a esté tué
d'un coup de pistoulet
Joseph Petit
mari de Louise‑Zabinne Hulin
âgé de 27 ans, décédé le 27 de septembre 1732.
Priez Dieu pour le repos de son âme.
Le chemin où se trouve ce monument est depuis appelé par les habitants : Chemin de la Croix‑Petit.»
Gaston Bercet, Histoire de Larouillies, 1900.
Le puissant seigneur de Floyon et Rainsart s’appelait Préseau.
Le premier de cette dynastie est un personnage violent :
« Jean Baptiste de Préseau, seigneur de Rinsart, grand bailli d'Avesnes, poursuit sa femme avec une
épée, un pistolet, un fusil, «qu'il a mesme déchargé vers elle, une hache avec laquelle il a brisé la porte de sa
chambre, un tison ardent» (chronique des procès devant l’officialité de Cambrai).
Né le 7 avril 1640 - Avesnes-sur-Helpe, (59), Nord-Pas-de-Calais, France ; décédé vers 1708 , à l'âge
de peut-être 68 ans. Grand bailli de le Terre et Paierie d'Avesnes. Il fut anobli à titre personnel par
Louis XIV en même temps que son père en mars 1674.
Il est entré dans le milieu des Maîtres de Forges par son mariage avec Isabelle Pétré. Dans son testament du 1er avril 1708, il demande à être inhumé en l'église de Floyon.
L’un de ses fils, prénommé également Jean-Baptiste (celui dont il est peut-être question ici), eut un fils, Louis Antoine, également seigneur de Floyon, chevalier de Saint-Louis, qui épousa Emilie Despret, fille d'un Maître de Forges.
2. La croix de pierre du chemin du Ludrin, de Larouillies à Floyon - 1806
Perdue dans la végétation, elle est amputée depuis fort longtemps.
Inscription sur la croix de pierre :
ICY
le vingt huit août 1806
blessé à mort Josse Tous
saint Alexis
de Larouillies
Décédé in…
(la croix est trop enfoncée dans la terre pour que l’on puisse lire la suite pour le moment sans mettre en danger son équilibre)
Qui était Toussaint Alexis Josse, qui fut victime d’un accident sur ce chemin ?
Acte de décès (transcrit avec l’orthographe originale)
L’an mille huit cent six, le vingt-neuf du mois d’aoust, par devant nous adjoint de maire affecté à l’état-civil de la commune de La Rouillies département du Nord canton d’Avesnes Sud, sont comparus Valentin Nairince âgé de trente trois ans, maréchal, domicilié à La Rouillies et Jean-Jacques Nairince âge de soixante ans, maréchal aussi domicilié à La Rouillies, le premier neveu par alliance, le second beau-frère ; lesquels nous ont déclaré que le vingt-huit du mois d’aoust vers neuf heures du soir Toussaint Alexis Josse, âgé de cinquante-trois ans, maréchal domicilié à La Rouillies, époux de Thérèse Nairince, fils des défunts Jean-Baptiste Josse et de Catherine Jacquet de leur vivant domiciliés à La Rouillies est décédé le vingt-huit du mois d’aoust vers neuf heures du soir en la maison du dit Valentin Nairince déclarant et les déclarant ont signé avec nous le présent acte après que lecture leur en a été faite.
signé :
J.J. Nairince, Valentin Nairince
Acte de naissance
Le deux octobre mil sept cens cinquante-deux est né et le lendemain fut baptisé Toussain Alexis Josse fils de Jean-Baptiste et de Catherine Jacquet son épouse légitime. Le parrain Toussaint Cervoise de cette paroisse. La mareine Marie Alexis Blancpain de celle d’Etroeungt icÿ soussigné en marge
C. Fontaine vicaire de La Rouillies
Marque de Toussaint Cervoise (une croix) ; marque de Marie Alix Blancpain (une croix)
Acte de mariage
L’an mil sept cens quatre-vingt-deux le vingt trois du mois d’avril après la publication dûment faite d’un ban dans cette église du vingt et un du présent mois dimanche et avoir obtenu dispense des deux autres au vicariat de Cambray, en date du vingt-un du même mois signée de Mgr l’évêque Damydes ( ?) Vicaire général et de Mr Martin secrétaire et sans empêchement découvert, ont reçu de nous la bénédiction nuptiale Toussaint Alexis Josse âgé de trente ans tourneur de style, fils du défunt Jean Baptiste et de Catherine Jacquet son épouse légitime d’une part
et Marie Thérèse Nairince âgée de trente-cinq ans fille de Jean-François et de Françoise Lefebvre son épouse légitime d’autre part
tous deux de cette paroisse : ils étaient accompagnés de Nicolas et Pierre Josse tourneurs de style frères de l’époux, de Jean-Jacques et Jean-François Nairince maréchaux de style frères de l’épouse qui ont signé avec nous ce jour mis et au-dessus comme témoins à ce requis.
(ils savent tous signer leur nom)
p. comb Frétinier prêtre vicaire de La Rouillies
3. La croix de pierre sur la RN2 - 1850
Elle est merveilleusement entretenue et fleurie par la dame qui habite la maison voisine.
Inscription sur la croix :
Ici et mort
Vincent BOSQUETTE
de La Flamangrie
le 24 septembre 1850
âgé de 58 ans
——
Priez DIEU pour le repos de son âme
Qui était Vincent Bosquette , qui fut victime d’un accident sur ce chemin ?
Acte d’état civil à Larouillies (transcrit avec l’orthographe originale):
L’an mil huit cent cinquante, le vingt-sept septembre à six heures du matin, par-devant nous Théodore Contesse, maire officier de l’état civil de la commune de Larouillies, canton d’Avesnes sud, arrondissement d’Avesnes département du Nord, ont comparu Augustin Daune âgé de cinquante ans, manœuvrier, et Pierre Clovis Fontaine âgé de vingt-huit ans, tailleur d’habits, tous deux domiciliés en cette commune, lesquels nous ont déclaré qu’aujourd’hui à six heures du matin Pierre Joseph Vincent Bosquette âgé de cinquante-neuf ans né et domicilié à La Flamengrie (Aisne), époux de Marie Rosalie Robinet, fils des défunts Pierre Joseph Bosquet et de Marie Angélique Geoffroy, tous de la Flamangrie, est décédé en la demeure de Augustin Daune sise en cette commune, ainsi que nous nous en sommes assurés, lesquels ont signé avec nous le présent acte, après qu’il leur en a été fait lecture.
Signatures : Daun - Clovis Fontaine - Le maire Contesse.
D’après le Livre des faits extraordinaires de la commune, Vincent Bosquette, roulier, a été tué par ses chevaux.
