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Joseph Roumanille, Le médecin de Cucugnan


C’était un médecin qui en savait long, car il avait beaucoup appris; et cependant, à Cucugnan, où il s’était établi depuis deux ans, on n’avait pas confiance en lui. Que voulez-vous? en le rencontrant toujours un livre à la main, les Cucugnanais se disaient:
— Il ne sait rien de rien, notre médecin
; il lit, il lit sans cesse. S’il étudie, c’est pour apprendre; s’il a besoin d’apprendre, c’est qu’il ne sait pas; s’il ne sait pas, c’est un ignorant.

Ils ne pouvaient pas sortir de là, et… ils n’avaient pas confiance en lui.
Un médecin sans malades est une lampe sans huile. Il faut pourtant gagner sa misérable vie, et notre pauvre diable ne gagnait pas l’eau qu’il buvait.

Il était temps, certes, que cela finît
!

Un jour, pour en finir, il fit dire dans tout Cucugnan que son savoir était si grand, si puissant, si souverain, qu’il se faisait fort, non seulement de guérir un malade, — ce qui est un jeu d’enfant, — mais de ressusciter un mort, ce qui peut s’appeler un vrai miracle de Dieu
!
— Oui, oui, un mort, disait-il, et un mort enterré
!….
Et je le ressusciterai quand on voudra, en plein jour, en plein cimetière,
coram populo.

Ah
! ceux qui le crurent ne furent pas nombreux!

[…]

— Mes amis, dit-il, je vous ai promis de ressusciter un mort. Je tiendrai parole. J’en lève la main. Voyons, du silence
! Il ne m’est pas plus difficile, je vous l’assure, de rappeler à la vie Jacques ou Jean, que Nanon ou Babet, que Claude ou Simon. Voulez-vous que je vous ressuscite… Simon? Comment l’appeliez-vous?…. Simon Cabanier… qui est mort d’une mauvaise pleurésie, voilà bientôt un an?

[…]

— Ah
! que vous faites bien de me le dire, Catherine!… Eh bien! alors, si je ressuscitais Nanon Carotte, qu’on enterra le beau jour de la Chandeleur!

— Gardez-vous-en bien, Monsieur le médecin, cria Jacques Lamèle. Nanon était ma femme. Nous sommes restés dix ans ensemble
: dix ans de purgatoire, tout Cucugnan le sait. Que Nanon reste où elle est, pour son repos et pour le mien. Un vrai poivre, Monsieur! têtue comme un âne, et fainéante, et querelleuse, et souillon, et déguenillée! Avec ça les mains percées, et une langue! une langue de vipère, Monsieur, qui aurait fait battre la Sainte Vierge et Saint Joseph! Et… je ne dis pas tout!

— Mais cependant, mes amis…

[…]

— Eh bien
! soit. Nous laisserons dormir Maître Pierre.
— Mais comme je ne suis pas venu ici pour enfiler des perles, et vous tous pour me regarder faire, je réveillerai… Qui voulez-vous donc que je vous réveille
?….

— Gothon
! réveillez-moi ma Gothon! s’écria à ce moment une brave femme, en pleurant comme une Madeleine.
— Non, non, Monsieur le docteur
! ne la réveillez pas! dit une jeune fille. Oh! non… Belle vierge, que tu as bien fait de mourir! Avant de mourir, elle me dit tout. Et puis nous lui mîmes sa belle robe blanche et des fleurs sur la tête!…. On aurait dit une mariée. En terre sainte laissez-la, car celui qu’elle aimait vient de s’enlever avec une autre!

— Pauvre… pauvre Gothon
!…. Tenez, tout cela commence à m’ennuyer. Je vais, pour en finir, réveiller le Gringalet, qui avala sa langue en mangeant de la morue, il y a un mois environ.

[…]

— Monsieur le docteur, dit alors une pauvre vieille en pleurant, ce petit mort est à nous, hélas
! et je suis sa mère-grand. Ma fille ne l’avait pas encore sevré; il mettait ses dents de lait, lorsque, pécaïre, il mourut. Ah! si vous aviez vu comme il était beau, notre petiot! Dieu nous l’a pris: eh bien! sa volonté soit faite! Nous en avons un autre qui tette. Dieu fait bien ce qu’il fait: ce qu’il prend d’une main, il le rend de l’autre. Nous ne pourrions pas en allaiter deux, et nous sommes trop pauvres pour en mettre un en nourrice!

Alors, le médecin
:

[…]

Et tout est bien qui finit bien.

(Traduction par le Docteur P. Yvaren).




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• 57 notes explicatives, en particulier des explications sur la religion catholique
• un guide de lecture sous la forme de questionnaire (sans corrigé)

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