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Le récit complexe
classe de 4e


Sommaire du dossier

Découvrir

* La perspective de narration: qui raconte?

Guy de Maupassant, « Pierrot »,
Les Contes de la bécasse, 1882.
Thierry Jonquet,
La Bombe humaine.

* Le point de vue: qui voit?

J. P. Nozière, Des crimes comme ci comme chat


Examiner

L’ordre des événements

*
Le retour en arrière

Bernardo Atxaga, Mémoires d’une vache (1), traduit du basque par A. Gabastou, © Gallimard Jeunesse coll Lectures junior, 1994.

*L’anticipation

Bernardo Atxaga, Mémoires d’une vache (2), traduit du basque par A. Gabastou, © Gallimard Jeunesse coll Lectures junior, 1994.


Approfondir

Le rythme du récit

*
Scène et sommaire

Voltaire,
Candide
Saint-Exupéry,
Vol de nuit.

*
L’ellipse
Série Astérix
: le gag des pirates, dans Le Devin.
Marie-Aude Murail, Le trésor de mon père

*
La pause

E. About,
L’homme à l’oreille cassée

————————————————————————————

EXTRAITS DU DOSSIER


Examiner
L’ordre des événements
: le retour en arrière

Les leçons de La Vache qui rit


Mô, vache malicieuse et très philosophe, vit à Balanzategui, une ferme isolée du Pays basque espagnol, peu après la guerre civile. Il se passe de drôles de choses dans la ferme. Pourquoi seules les vaches noires sont-elles, certains soirs, enfermées dans l’étable? Qui sont les mystérieux cavaliers qui descendent de la montagne à la nuit tombée?

La Vache, très sérieuse, m’observa longuement. […]
— La vérité, c’est que je ne sais rien de source sûre mais, bien sûr, j’ai ma petite idée.
— Ah bon, et laquelle
? lui demandai-je avec la candeur d’une vache qui venait de voir le jour.
Elle m’observa à nouveau longuement de ses yeux si brillants, plus sérieuse que jamais.
— As-tu déjà entendu parler de la guerre? me demanda-t-elle après un moment de silence.
— Non, pas du tout
!
— Jeune comme tu es, c’est tout à fait normal. Mais moi, j’ai de la bouteille et j’ai déjà vu pas mal de choses sur cette terre. La guerre, par exemple. Regarde la vallée de Balanzategui, regarde le ciel tout là-haut, ces montagnes et ces bois…
La Vache qui Rit s’interrompit et se tut. De mon côté, je fis ce qu’elle m’avait demandé et regardai la lune. En ce tout début de soirée, la vallée était plongée dans le silence, on n’entendait que les rumeurs portées de-ci de-là par le vent du sud.
La Vache reprit la parole
:
— Oui, à présent règnent partout le silence et la paix. Mais tu aurais dû voir cette vallée il y a un an de cela. Des coups de fusil à tout bout de champ de jour comme de nuit. Des coups de canon aussi. Sans oublier les avions qui mitraillaient les alentours et tuaient tout ce qui bouge. L’un d’eux est tombé pas loin d’ici, en haut de la vallée. Un avion très joli, tout petit, argenté.
Tout excitée, je m’écriai:
— Où est-il? Comme j’aimerais le voir!
Je n’avais jamais vu d’avion.
— Si tu savais où il était, tu saurais autant de choses que moi, ma jolie! me répondit sèchement La Vache. C’est mon secret, je suis la seule à savoir où il se trouve. Peut-être te le montrerai-je un jour, enfin on verra.
La Vache me regarda attentivement. Étais-je ou non une vache sotte? Tel était son dilemme. Elle ne voulait pas montrer l’avion accidenté à une vache idiote.
— Même si tu ne me montres pas l’endroit, je le trouverai! lui répondis-je en essayant d’adopter le même ton sec qu’elle. Mais j’aimerais bien que l’on revienne sur cette histoire de guerre et sur ce qui s’est passé au moulin.
La Vache leva la tête. Ma façon de réagir lui plaisait.
— Eh bien, il n’y a pas si longtemps, ici c’était la guerre! dit elle d’un ton plus aimable. Il y avait des soldats des deux camps. Et beaucoup d’entre eux ont trouvé la mort. Trois dans ce bois.
— Trois hommes
?
— Oui, trois hommes. Ils ont été tués juste un petit peu plus loin. Il y avait parmi eux le mari de Genoveva.
La curiosité piquée au vif, je ne me contenais plus.
J’étais si pressée de savoir ce qui s’était passé que j’en avais le souffle coupé.
— Le mari de Genoveva? Et qui est Genoveva?
— La patronne de Balanzategui
! Qui veux-tu que ce soit? s’écria La Vache irritée.

Bernardo Atxaga, Mémoires d’une vache, traduit du basque par A. Gabastou, © Gallimard Jeunesse coll Lectures junior, 1994.


Bernardo Atxaga est né dans un village du Guipuzcoa, au Pays basque. D’abord économiste dans une banque, il est devenu écrivain à temps complet. Obabakoak est le premier de ses romans à être traduit en français. Mémoires d’une vache a été très remarqué et traduit dans plusieurs langues.

Observons

1. Dites si les informations suivantes sont vraies ou fausses.
A. Mô est beaucoup plus âgée que la Vache qui Rit
B. Un avion de guerre s’est écrasé dans la vallée l’année précédente.
C. Personne ne sait où se trouve l’épave de l’avion.
D. Quatre soldats ont été fusillés à la ferme.
E. Le mari de Genoveva a trouvé la mort dans le bois.

L’intérêt du texte

2. Qui est l’auteur du roman? Qui raconte l’histoire?
3. Le narrateur comprend-il tout ce qui se passe autour de lui
? Justifiez par des exemples.
4. Qui informe le narrateur
? Cet informateur sait-il tout de ce qui se passe?
5. D’après ce passage, quel est le caractère de La Vache qui Rit
? de Mô?

La place du texte dans le dossier

7. Placez les principaux faits sur une flèche qui représente l’axe des temps (passé, présent, futur). Les événements sont-ils rapportés selon l’ordre chronologique?
8. Repérez les indications de temps, les temps verbaux employés dans le passage des lignes 00 à la fin
: que constatez-vous (« Mais j’aimerais bien… fin du texte) ?
9. Dans la liste suivante, quelles affirmations s’appliquent au passage l. 00 à la fin
:
1. C’est un récit dans le récit.
2. Il correspond aux souvenirs d’un personnage.
3. Il est constitué d’informations fournies directement par le narrateur.
4. Il donne à connaître certaines caractéristiques d’un personnage.
5. Il rend compréhensible le comportement d’un personnage.
6. Il permet de prévoir le comportement d’un personnage.
7. Il donne des informations qui rendent possible la suite de l’histoire.
8. Il crée du suspense.
9. Il évite la monotonie d’un récit strictement chronologique.
10. Il permet de commencer le récit des événements à un moment qui ne correspond pas au début de l’histoire.

Expression écrite

Imaginez le cadre de l’histoire. Décrivez la vallée de façon à pouvoir insérer votre texte après le passage suivant: « Regarde la vallée… ces montagnes et ces bois. »

Retenons

Dans un récit, l’auteur peut choisir de présenter ou non les événements dans l’ordre chronologique, c’est-à-dire de respecter ou non l’ordre d’apparition des faits dans le temps.
Un retour en arrière peut raconter le passé d’un personnage ou évoquer des faits anciens qui expliquent l’origine des événements racontés.
L’auteur peut faire débuter son récit au moment où l’action est déjà engagée, et rappeler ensuite comment tout a commencé. Dans ce cas, l’auteur perturbe l’ordre des étapes du schéma narratif.


L’ordre des événements: l’anticipation

Tout cela viendrait plus tard…


Le pâle soleil de l’après midi qui venait de sortir me permettait de distinguer la longue-vue du moulin, ou plutôt le reflet que renvoyait le verre de temps à autre. Quand les Dentus tournaient l’instrument vers le soleil, du moulin jaillissait une sorte d’étincelle.
— Regarde les jumeaux! dis-je à La Vache.
— Oui, ils sont de garde et inspectent de tous côtés au cas où quelqu’un s’approcherait de Balanzategui.
— D’après toi, qu’est-ce qui se passe là-bas
? lui demandai-je, entrant ainsi directement au cœur du sujet.
— Je t’ai déjà dit que la guerre qui a commencé en 1936 n’était pas encore terminée. Du moins dans notre vallée. Ceux qui descendent de la montagne en cachette ne veulent pas se rendre et continuent de combattre le Général. Une attitude très dangereuse, cela ne fait aucun doute.
— Le Général, c’est Lunettes Vertes
? demandai-je ingénument.
J’avais beau devenir fine mouche, en ce qui concernait les histoires de guerres j’étais encore au berceau. Tout cela viendrait plus tard, après avoir franchi la frontière et rencontré Pauline Bernadette. Car la petite religieuse avait participé à l’autre guerre européenne, qui s’était déroulée en France, en Angleterre, en Allemagne et ailleurs, et elle avait aidé les maquisards, autrement dit les bataillons qui ne voulaient pas se rendre. Je me souviens de la visite d’un prêtre répondant au nom de père Larzabal:
— Prends ces papiers, petite Pauline! lui dit-il en lui remettant un paquet. Et comme tu le sais, cet après-midi même, accompagnée de ta vache noire, tu vas aller à Altzuruku par le chemin de la montagne. Les maquisards te reconnaîtront et viendront à ta rencontre au moment qui leur semblera le plus approprié. La mère supérieure du couvent qui était devant eux fronça les sourcils:
— J’ai peur, père Larzabal
! Sœur Pauline-Bernadette court un grand danger! Il y a des soldats postés à tous les carrefours. S’ils fouillent ses vêtements, ils mettront notre petite Pauline en prison!
— Ma mère, ne vous faites pas de souci
! lui répondit le père Larzabal. Regardez la tête de Pauline, puis regardez celle de la vache. Si quelqu’un doit être fouillé par les soldats, ce sera la vache! La petite religieuse intervint:
— Mais moi je ne veux pas qu’on fasse du mal à Mô
! Le père Larzabal lui répondit:
— Ne t’en fais pas, Pauline, vous formez un très joli couple et il ne va rien vous arriver du tout. Et tout se passa comme avait prévu le prêtre. Moi, ils me fouillèrent un peu mais la petite religieuse pas du tout, d’ailleurs ils ne la regardèrent même pas. Et avant d’arriver à Altzuruku, elle remit les papiers à la personne à qui ils étaient adressés.
Mais, comme je l’ai déjà dit, cette expérience eut lieu après les événements de Balanzategui. C’est pourquoi j’avais posé cette question candide à La Vache, pourquoi je lui avais demandé si c’était Lunettes Vertes le Général.
— Non! Pas du tout! me répondit La Vache. Lunettes Vertes, ou plutôt Coutelas, est un tueur à gages que le Général a envoyé ici pour arrêter les rebelles qui évoluent autour de Balanzategui. C’est un tueur à gages, rien de plus!
— D’après toi, Genoveva et Le Tordu sont très impliqués dans cette histoire
?
— Oui, je crois. Eux aussi sont en guerre, m’assura La Vache en parlant lentement et en pesant chaque mot. À Balanzategui, les vaches sont de vraies vaches et l’herbe de la vraie herbe. Mais le reste, ce ne sont que de simples apparences. À commencer par la ferme, ce n’est ni une exploitation agricole ni une métairie. On dirait pourtant, mais c’est faux. Tu as bien vu qu’il n’y avait pas de chien devant la porte et que nous, les vaches, nous ne faisions rien. De plus, figure-toi qu’il n’y a ni poules, ni brebis, ni aucun autre animal domestique. Et comble du comble, ils ne savent pas non plus faucher, pas plus Le Tordu que Genoveva. J’acquiesçai
:
— Très juste
!
— Et puis il y a ce que nous avons appris hier, ajouta La Vache. La camionnette ne transporte pas de l’aliment pour nos banquets mais du riz pour ceux de la montagne. Voilà à quoi sert à présent Balanzategui, c’est une sorte d’entrepôt pour les gars de la montagne. Sans Balanzategui ils mourraient de faim, et alors finie la guerre et tout le reste
!
— Stupéfiant
! m’écriai-je. […]

Bernardo Atxaga, Mémoires d’une vache, traduit du basque par A. Gabastou, © Gallimard Jeunesse coll Lectures junior, 1994.


L’intérêt du texte

1. Voici la liste des faits dans leur ordre d’apparition dans le texte. Reconstituez l’ordre chronologique.
1. Mô et son amie la Vache sont en grande conversation dans le pré de la ferme.
2. Depuis plusieurs jours, deux individus surveillent la ferme à la longue-vue.
3. La guerre a commencé en 1936, et elle est finie, sauf dans cette vallée basque.
4. Avec Mô, la religieuse Pauline-Bernadette a aidé des maquisards en France pendant la Seconde guerre mondiale.
5. Le général Franco a envoyé des tueurs à gages pour arrêter les cavaliers de la montagne.
6. La ferme sert d’entrepôt de nourriture pour les cavaliers de la montagne.

La place du texte dans le dossier

2. Relevez les indications de temps qui encadrent le passage des lignes 00 à 00: que constatez-vous (« Tout cela viendrait plus tard »… avant « Mais comme je l’ai déjà dit… ») ?
3. Quel peut être l’inconvénient de cette manière de raconter l’histoire
?
4. Dans la liste suivante, choisissez les affirmations qui vous paraissent s’appliquer au passage l. 00 à 00
:
1. C’est un récit dans le récit.
2. Il correspond aux souvenirs d’un personnage.
3. Il est constitué d’informations fournies directement par le narrateur.
4. Il rassure le lecteur sur le sort d’un personnage.
5. Il rend compréhensible le comportement d’un personnage.
6. Il permet de prévoir le comportement d’un personnage.
7. Il crée du suspense.
8. Il évite la monotonie d’un récit strictement chronologique.

Expression écrite
1. La religieuse est interrogée par les soldats alors qu’elle va porter des messages aux maquisards. Imaginez la scène en la racontant du point de vue de la vache.
2. Résumez toute l’histoire à la troisième personne, sans narrateur présent dans le texte.

Retenons
Les dates, les événements importants, les personnages historiques mentionnés, les lieux, permettent parfois de situer un récit dans une époque.
L’auteur peut interrompre le déroulement chronologique d’un récit pour raconter ou annoncer des événements qui se produiront plus tard dans l’histoire.
Ces anticipations qui suppriment le suspense sont plus rares que les retours en arrière.

[…]

EXTRAITS DU CORRIGE

TEXTE 2 CANDIDE CHASSE DU PARADIS TERRESTRE

INTRODUCTION

L'extrait prend place à la fin du chapitre premier du conte. Candide, bâtard de la sœur du baron de Thunder-ten-tronck, est élevé dans « le plus beau des châteaux », où séjournent aussi le baron, sa femme, leur fils et leur fille Cunégonde, ainsi que le précepteur Pangloss. Mais, surpris en compagnie de Cunégonde, Candide en est brusquement chassé.
La scène est généralement lue comme une parodie de la Genèse
: Candide, comme Adam, est « chassé du paradis terrestre » après une scène qui est la réplique du péché originel.
L'intérêt de ce passage est d'être caractéristique de la narration voltairienne
: beaucoup d'actions, peu de paroles, très peu d'imparfait, ce temps du discours stérile ; le rythme effréné auquel est soumise l'action dans le conte obéit au dessein de ne jamais ennuyer le lecteur.

L’INTÉRÊT DU TEXTE:

8) Les personnages ne sont pas décrits, mais nous pouvons deviner qu’ils sont amoureux l’un de l’autre « Cunégonde en revenant au château rougit ; Candide rougit aussi. » ; « Cunégonde laissa tomber son mouchoir, Candide le ramassa, elle lui prit innocemment la main. »
9. C’est Cunégonde qui mène l’action, elle est la première à rougir, elle laisse tomber le mouchoir, elle prend la main de Candide. C'est la femme tentatrice du récit de la Genèse ! Elle est l'initiatrice de Candide, jeune benêt timide au nom transparent dans lequel se lisent son ingénuité, sa pureté, sa confiance naïve.

10. Voici les actions effectuées en parallèle par les personnages
:
- actions de Cunégonde
: « Elle rougit, elle dit bonjour, elle laissa tomber un mouchoir, elle lui prit innocemment la main. »
- actions de Candide
: « Candide rougit aussi, Candide lui parla sans savoir ce qu’il disait, Candide le ramassa, le jeune homme baisa innocemment la main de la jeune demoiselle. »
- actions communes
: « leurs bouches se rencontrèrent, leurs yeux s’enflammèrent, leurs genoux tremblèrent, leurs mains s’égarèrent. » Cette manière de raconter produit un effet comique dû à la rapidité, aux parallélismes syntaxiques, à la progression dans la scène de séduction.

11. Le temps de lecture est bref alors que la scène de séduction a duré plus de trois minutes. On peut faire remarquer que le temps du récit est condensé par rapport au temps de l'histoire comme si le narrateur voulait précipiter les événements.
Le genre du conte implique un désintérêt pour l'effet de réel et les personnages n'ont aucune « épaisseur psychologique »
: Voltaire met en scène des silhouettes rapidement esquissées, des marionnettes plus que des individus, qui remplissent un rôle déterminé, assez conventionnel, ou qui incarnent une idée. Candide perd sa candeur, trait psychologique qui dépasse, chez lui, les limites de la vraisemblance.

12. Les deux scènes s'opposent point par point: l'épaisseur psychologique du personnage de Simone Fabien, la densité de sa présence et de son émotion dans l'implicite du dialogue, les effets de réel, les silences de la scène qui se déroule sous les yeux du lecteur s'opposent au rythme sautillant et allègre de deux charmantes marionnettes qui jouent une scène de farce, comme dans un dessin animé ou une séquence de film muet.

[…]






Étude publiée dans le manuel
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