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Écrire une nouvelle fantastique


Première étape: choisir un personnage, un thème fantastique

Un récit fantastique est un récit où l’auteur présente sans y croire des êtres et des événements effrayants et réellement impossibles.
Le récit fantastique se caractérise par l’irruption brutale et menaçante du surnaturel dans un monde qui ressemble au nôtre. Le phénomène y devient une agression interdite, menaçante, qui brise la stabilité d’un monde dont les lois étaient jusque-là cohérentes, rigoureusement logiques et immuables. Il est l’Impossible, ce qui ne peut pas arriver et qui se produit cependant.
L’élément essentiel du récit fantastique est donc le phénomène, tout entier sous le signe de l’Autre Monde. Le choix du thème de votre récit est donc très important. Pour vous aider, voici une liste de personnages et de thèmes possibles. Nous les accompagnons d’indications de lectures, dont la plupart figurent dans la
Grande Anthologie du Fantastique de J. Goimard et R. Stragliati, 4 vol, coll. Omnibus, Presses de la Cité, rééd. 1997.

1. Le magicien ou le sorcier
Ce thème met en scène un être humain allié de l’Au-delà. Le magicien agit sur la nature avec des formules magiques ou des enchantements qui ont un pouvoir fatal sur les humains. La malédiction d’un sorcier entraîne une maladie épouvantable et surnaturelle.
La Marque de la bête, de Rudyard Kipling, Lutundo, d’Edgar Lucas White, Les Lèvres de Henry Whitehead, en sont des exemples connus. La magie ou les prédictions astrologiques sont le thème du Miroir d’encre de J.-L. Borges et de La Main enchantée de G. de Nerval.

2. Le fantôme
C’est un mort qui revient parmi les vivants pour les tourmenter. Une âme en peine exige pour son repos qu’une certaine action soit accomplie
; un défunt revient sur terre pour persécuter son meurtrier; un châtiment attache un fantôme au lieu où il a accompli un forfait; un spectre est condamné à une course désordonnée et éternelle; un mort revient pour se venger ou annoncer une mauvaise nouvelle. Ce thème a été mis en œuvre par William Austin, dans Peter Rugg le Disparu, par Ann Bridge dans La Limousine bleue, par Alexandre Pouchkine dans La Dame de pique, par Bram Stoker dans La Maison du juge, par Charles Dickens dans Le Signaleur, par R. Hickens dans Comment l’amour s’imposa au professeur Guildea.
La femme fantôme, issue de l’au-delà, est toujours séductrice et mortelle
: le vivant qui l’aime et l’a perdue la rappelle et reste prisonnier de la morte. Les récits débouchent sur la folie. Ce thème a été développé par plusieurs chefs-d’œuvre: Véra, de Villiers de l’Isle Adam, Ligeia, La Chute de la maison Usher, d’Edgar Poe

3. Le double
[…]

4. La « chose »
[…]



5. Le vampire
[…]


6. La statue animée
[…]


7. Le monstre
[…]



8. Le diable
[…]



9. La mort
[…]



10. L’aberration de l’espace
La chambre, l’appartement, l’étage, la maison, la rue sont effacés de l’espace. Un lambeau d’espace est aboli à l’improviste, et le voyageur ne retrouve plus au matin la chambre où il a dormi la nuit
: la paroi est lisse et sonne plein. Il n’y a pas de chambre à cet endroit, il n’y en a jamais eu. Ce thème est illustré par Jean Ray, dans La Ruelle ténébreuse, par F. J. O’Brien dans La chambre perdue, par M. R. James dans La chambre n° 13 et H. P. Lovecraft dans Les rêves dans la maison de la sorcière.
Le thème exemplaire dans cette catégorie est le labyrinthe, à la fois ouvert et isolé, multipliant les tours et les détours. Le labyrinthe est un décor truqué, un espace aberrant chez Lovecraft,
Les Montagnes hallucinées, ou Borges, La Bibliothèque de Babel.

11. L’arrêt ou la répétition du temps

[…]



Deuxième étape: Le scénario

Tous les récits fantastiques ne se déroulent pas selon la même progression, bien heureusement. Cependant, des constantes existent, et nous allons les rappeler pour vous aider. Ces étapes sont l’introduction, l’avertissement, la transgression, l’aventure, le châtiment et la conclusion. Vous pourrez l’utiliser avec souplesse.

L’introduction
Dans l’introduction, le narrateur explique en général pourquoi et comment il est amené à raconter l’aventure qui lui est arrivée, à lui ou à un de ses proches, ou dont il a été témoin. Il introduit l’événement étrange en racontant ce qui l’a précédé et qui reste dans le domaine réaliste. Le héros n’a aucun soupçon de ce qui va lui arriver, il n’a pas peur car son aventure commence de manière banale et ne comporte que de petits faits insolites et isolés. L’histoire commence par quelques pages réalistes, situées dans la banalité quotidienne, mais où se glissent déjà, très discrètement, quelques événements étranges.

Quand nous partîmes pour notre promenade, le soleil brillait avec […]
Il se signa en répondant laconiquement
: « Walpurgis Nacht ! »

Bram Stoker, L’Invité de Dracula, in Les cent ans de Dracula, Librio, 1997.


8 mai — Quelle journée admirable ! J’ai passé toute la matinée étendu sur l’herbe, devant ma maison sous l’énorme platane qui la couvre, l’abrite et l’ombrage tout entière. J’aime ce pays, et j’aime y vivre s parce que j’y ai mes racines, ces profondes et délicates racines, qui attachent un homme à la terre, où sont nés et morts ses aïeux, qui l’attachent à ce qu’on pense et à ce qu’on mange, aux usages comme aux nourritures, aux locutions locales, aux intonations des paysans, aux odeurs du sol, des villages et de l’air lui même.

Guy de Maupassant, Le Horla, Librio, 1994.


L’avertissement
L’avertissement est le début de l’action fantastique.
[…]


Jean Ray, La choucroute, in La dimension fantastique, Librio, 1996.


La transgression
Le héros ne tient pas compte de l’avertissement et accomplit ce qu’il désirait faire, ou succombe à la tentation.
[…]

Ernst Theodor Amadeus Hoffmann, La soucoupe volante, in Contes des frères Sérapion, trad. Albert Béguin, © Éditions Phébus, 1979.


L’aventure
N’ayant pas tenu compte de l’avertissement, le héros va se trouver entraîné involontairement dans une aventure étrange. […]

Théophile Gautier, La cafetière, in La dimension fantastique, Librio, 1996.


Le châtiment
Le héros vit désormais dans l’obsession du phénomène. Face au danger, la fuite est toujours vaine. Le héros d’un récit fantastique est toujours une victime. Le châtiment peut prendre la forme de la malédiction, la mort, la folie.

Aussitôt, mordus à rage, les hommes s’armèrent de tout ce qui pouvait tuer et partirent à la Font-Chalard. Mais ces vengeurs ne devinrent pas des assassins.
Le grand Chadorne gisait raide devant le trou d’eau, mort, étranglé par les manches du manteau des loups.
« Il n’aurait pas fallu… il n’aurait pas fallu… », grognait Eugène, tout en s’acharnant à vouloir les desserrer de la gorge du grand Chadorne. Et il lui donnait en même temps de rudes coups de pied, à croire une bête immonde crevée là.
Enfin, on l’aida en tranchant à coups de hache ces manches poilues, dures comme des pattes, ou des… bras ?
Ces choses-là, voyez-vous, on ne les oublie jamais.


Claude Seignolle, Une veillée, in Histoires vénéneuses, © Marabout, série fantastique.


La conclusion
La conclusion marque la fin de l’événement fantastique. Tout le récit doit se terminer par un point d’interrogation.
[…]

Jean Ray, Le Tableau, in Les contes du whisky, © C. Lefrancq, 1996, coll. Lefrancq en poche.


Troisième étape: construire le personnage

Le héros principal d’un récit fantastique possède certaines caractéristiques. Au départ, c’est un homme comme tout le monde, qui est bien loin d’avoir l’étoffe d’un héros. Il se caractérise par sa banalité. Ce fait permet au lecteur de mieux s’identifier au personnage et de mieux susciter l’angoisse
: si le fait surnaturel peut intervenir dans une vie aussi tranquille, rien ne s’oppose à ce que moi aussi, lecteur, je puisse en être également la victime.
[…]

Guy de Maupassant, La Nuit.


Quand le personnage se trouve en présence du phénomène, il est déchiré entre ses convictions rationnelles et la réalité de ce qu’il a vu. Plus personne ne le comprend, et sa solitude s’en trouve renforcée.
[…]


Théophile Gautier, Arria Marcella.


Quatrième étape: choisir un narrateur

De nombreux récits fantastiques sont écrits à la première personne, mais le choix de la troisième personne est tout à fait possible. le choix de tel ou tel mode de narration dépend de l’effet que vous voulez produire sur le lecteur.

Le récit à la troisième personne

[…]



Le récit à la première personne

Deux cas sont possibles
:
Le personnage narrateur
[…]



Le narrateur témoin
[…]


Cinquième étape: varier le rythme du récit

La composition en gradation
[…]



La composition en accent circonflexe
[…]


La composition en ligne brisée
[…]



La construction en enchâssement: le récit dans le récit
Un certain nombre de récits fantastiques se présentent sous la forme d’histoires racontées au cours d’une soirée entre amis. L’histoire fantastique est enchâssée dans un premier récit qui met en scène les personnages de la veillée. Elle prend parfois la forme d’un journal écrit par le héros, le premier narrateur se contentant de présenter le document dont il affirme l’authenticité. C’est le cas du célèbre
Tour d’écrou de Henry James, de nombreux récits de Maupassant: La chevelure, La Main, La Peur.
De tels récits s’achèvent sur un retour au monde normal, cohérent et ordonné du lecteur. L’effet fantastique s’en trouve atténué.


Sixième étape: décrire l’Impossible

Comment dire l’indicible ? Comment décrire ce qui n’existe pas ? Voilà la plus grande difficulté d’écriture à laquelle vous allez être confrontés. Vous aurez sans doute la tentation de l’horreur, du « gore », mais un véritable travail d’écriture méprise ces effets trop voyants et trop faciles. Voici quelques « trucs » qui vous permettront de faire monter l’angoisse de façon plus subtile.

La caractérisation par défaut
[…]


Villiers de l’Isle Adam, L’Intersigne.


La description négative
[…]


H. P. Lovecraft, Je suis d’ailleurs, in La dimension fantastique, Librio, 1996.


La description hyperbolique
Le narrateur amplifie les effets, grossit les détails, utilise toutes les ressources d’un vocabulaire précis, varié, ainsi que des exagérations, des accumulations qui peuvent se combiner au procédé précédent.

[…]


H. P. Lovecraft, Je suis d’ailleurs, in La dimension fantastique, Librio, 1996.


La description oblique
Le phénomène n’est pas décrit
; il n’est jamais vu en pleine lumière, ni sous tous ses angles: la nuit, le crépuscule, le brouillard, la pluie masquent tout en montrant.
[…]


• 
Les images: comparaisons, périphrases, métaphores et métonymies

Le phénomène ne peut être désigné et décrit que par des périphrases, des comparaisons, des métaphores, à la fois pour augmenter la puissance de l’évocation et parce que le langage humain est impuissant à en rendre compte.

[…]


Théophile Gautier, Arria Marcella.



Le vocabulaire du regard
Le thème du regard est omniprésent dans la littérature fantastique
: il faut traduire l’angoisse du personnage face au phénomène qui regarde et ne dit rien, et manifeste toute sa puissance en apparaissant.
[…]


Maupassant, Le Horla.

La syntaxe et la ponctuation
Pour exprimer d’une façon appuyée un sentiment, une émotion, une réaction vive, vous utiliserez les points d’exclamation, les points d’interrogation, les points de suspension.
[…]


R. L. Stevenson, L’étrange cas du Dr Jekyll et de Mister Hyde.


— À peine l’écho de mes coups était-il tombé dans le silence, qu’une voix me répondit du fond de la tombe ! — une plainte, d’abord voilée et entrecoupée, comme le sanglotement d’un enfant, puis, bientôt, s’enflant en un cri prolongé, sonore et continu, tout à fait anormal et anti humain, — un hurlement, — un glapissement, moitié horreur et moitié triomphe, — comme il en peut seulement monter de l’Enfer, — affreuse harmonie jaillissant à la fois de la gorge des damnés dans leurs tortures, et des démons exultant dans la damnation !

Edgar POE, Le Chat noir.


Le vocabulaire de la peur
La peur est liée au phénomène surnaturel qui surgit tout à coup. Elle saisit le héros brutalement et de plus en plus fort, jusqu’à un paroxysme. Il est donc important de varier les moyens d’expression de la peur, afin de ménager une progression.
[…]

Guy de MAUPASSANT, La Main.


[…]


L’Homme au sable d’Hoffmann (1776-1822).


Septième étape: corriger son brouillon
Corriger son brouillon, ce n’est pas seulement intervenir sur l’orthographe et la ponctuation.
Certaines techniques peuvent vous aider à améliorer facilement votre texte.

La présentation matérielle du brouillon
Le traditionnel cahier de brouillon n’est pas l’instrument le plus pratique. Il est plus intéressant d’écrire sur des feuilles de format A4, et uniquement au recto. Ceci permet de déplacer sans difficulté un paragraphe ou un passage du texte sans avoir à le réécrire, avec des ciseaux et du ruban adhésif. Si vous travaillez sur un ordinateur, ce travail de déplacement vous sera nettement facilité.
[…]



• 
Les interventions sur le brouillon
Celles-ci peuvent être de quatre types
: la réécriture, l’addition de détails indispensables, le déplacement, la suppression. Entraînez-vous par les exercices suivants;

1. Réécriture

Voici le début d’une nouvelle fantastique. Récrivez-la en travaillant successivement
:
— la cohérence des lieux
— la présentation et la caractérisation des personnages
— le respect des lois du fantastique, en éliminant des traces de merveilleux.

[…]

2. Addition
1e exercice
Dans le passage suivant, étoffez le dialogue en ajoutant
— des précisions sur les interlocuteurs
— des verbes introducteurs précisant le ton, le timbre des voix, la manière de parler.

[…]


2e exercice
Dans le passage suivant, précisez les sensations physiques, les sentiments, afin d’insister sur l’émotion ressentie par le personnage
:

[…]


3
. Déplacements
Comparez les deux versions suivantes du même début de nouvelle
:
[…]


4. Suppression
Ce geste de correction est plus rare quand il intervient sur un paragraphe ou même sur une phrase entière. En revanche, il est fréquent à l’intérieur d’une phrase.

Comparez les versions suivantes
:



Les relectures
Relisez souvent votre texte, surtout si vous êtes « bloqué »
Les relectures vous permettront d’éviter l’oubli d’un élément, ou les contradictions qui peuvent surgir sur les heures, les lieux, les particularités physiques ou psychologiques d’un personnage…
[…]

Huitième étape: un recueil de nouvelles fantastiques

Après avoir soigneusement revu votre brouillon, vous mettrez votre texte au net avant de le présenter à toute la classe, qui fera ses critiques positives et négatives, mais toujours constructives !
Pour présenter en recueil les nouvelles écrites par l’ensemble de la classe, veillez à leur ordre de présentation, en pensant au lecteur
: rythmez le recueil en alternant les thèmes proposés, la longueur des textes, le mode de narration. Veillez particulièrement à la première nouvelle, celle qui donne envie d’aller plus loin.
Rédigez la table des matières en travaillant soigneusement sur les titres que vous allez donner aux textes, en ménageant un effet d’unité et en suggérant le mystère.
Enfin, vous rédigerez ensemble une quatrième de couverture et, peut-être, une introduction qui résumera les étapes de cette grande aventure d’écriture en classe.
Il restera à chercher un titre à l’ensemble et à choisir des illustrations.

Vous trouverez une vingtaine de nouvelles fantastiques écrites par des élèves
ici et ici

Étude publiée dans Textes et expression Nathan 4e
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